rétro 13
J’ai pris l’idée au Tiers Livre sauf qu’ici, il m’en manque une : j’ai bien cherché et décidé de remplacer celle qui manque (je ne sais laquelle) par celle-ci qui se trouve sur le bureau
si je ne mettais qu’une seule photo, pour toutes celles que j’ai prises, réalisées, produites, archivées classées touillées recadrées et enfin publiées (nous sommes tous des éditeurs) (mais nous ne sommes pas des numéros dirait le prisonnier : je n’ai pas compté mes photos de l’année, je ne les compterai pas et les comptes c’est pour l’administration), si je n’en mettais qu’une, c’en serait une de voyage, il suffit de passer le pont, dit la chanson
c’était avant d’aller écouter Antonio Zambujo (grâce à apap) à l’institut du monde arabe, qui n’était pas encore sous la coupe de l’habitant place des Vosges (je n’aime pas balancer), alors par la contrainte (une photo/mois le 12 du mois-ou alors le 11 ou alors le 13), j’ai regardé ce qu’il y avait à voir, et j’ai choisi, dans le stock, il y avait des photos de métro, beaucoup, dont une statue du commandeur
je me souviens qu’il était vaguement question de savoir qui apporterait quoi et lui se chargerait du vin (on y parlait d’autre chose, plus intimes dont j’ai saisi la teneur, mais sans vraiment comprendre, je ne note pas et c’est pourquoi la paparazzeria sonore devrait être expérimentée) (les gens, quels qu’ils soient, voleurs ou faquins, princes, misérables ou gueux, lorsqu’ils sont pendus à leur téléphone, sont encore dans une intimité factice, qu’eux seuls perçoivent, alors ils font des gestes, crient parfois, comme s’ils étaient dans leur chambre/salon/cuisine et non dans un lieu public : c’est le meilleur moment pour leur tirer le portrait, sans doute pour ça que je ne réponds pas au téléphone quand dehors il (me)sonne), descente du faubourg, le magasin le plus comble de Paris
on n’y entre d’ailleurs pas, jamais, non, on attend dehors, j’y fais réparer mes vêtements parfois, une fermeture éclair, une poche trouée (il faut que j’y aille, j’ai oublié) et c’est déjà avril, le métro : ici le poète qui vend ses feuilles, un petit poème à un euro, il passe comme celui qui chante Eagles sur les rythmes de la musique arabe
Nation-Etoile (Dauphine) par Barbès, sans doute vers Rome, je ne sais plus exactement, j’aime le type au premier plan (autoportrait sans doute), j’avais un livre à la main, je lis dans le métro en réalité, je lis, je regarde, et la photo, de temps à autre
celle-ci du chantier de la bataille Stalingrad (comment est-ce, Volgograd de nos jours ? quelque chose de l’odeur de la mort en tout cas, les martyres qui tirent sur les déclencheurs de leur bombes dont ils se sont couverts, des femmes… aussi : ce monde me blesse, tu sais) et j’avais conçu, un peu inconsciemment, lors de mon anniversaire, une sorte de dead line pour soixante dix (j’en ai parlé, on a ri, on a pensé à autre chose : j’y pense toujours)
ah que j’aime cette photo et cette femme, lorsque je naquis, elle était déjà reine, comme j’aime son reflet à la rue de Buci, l’avenue qui porte le nom de son père, Georges Vé disait Brel, née en vingt six, reine en cinquante deux et depuis, la découverte de Londres voilà un peu plus d’un an, cette ville Jack l’Eventreur et Sherlock Holmes, les brouillards le fog
juillet mois des vacances quelle chance, quelle magnifique chance le bac croise l’autre au bout du fil de lampes, un autoportrait encore au polo bleu au fond les nuages, les monts la joie de vivre doucement voir le monde, ah quelle perspective, écouter du fado, manger des fruits boire un ouzo sur le port, « ne se souvenir que des belles choses » (c’est le mail de voeux, à Désormière qui porte ce titre, sans doute quelque chose du vase communicant qui restait sur l’affichage de la machine), ce fut le mois d’août, puis septembre
les fruits, le feu, les taupes, les paysages et les ciels, partir voir le monde
(en réalité c’est cette image-ci qui me manquait) c’est Barcelone, coin de l’avenue et angles droits (Passeig de Gracia et Gran Via de les Cortes Catalanes, soyons précis), parallèle et diagonale, des villes comme s’il en pleuvait, Paris capitale lumière cinéma piétons et boutiques, voilà plus de quarante ans que j’y vis, j’y tente de vivre (j’y arrive, en effet), plus de quarante ans à lire dans le métro
par Barbès, Etoile-Nation, hier au séminaire, A. Gunthert disait les mots de Robert Capa « si la photo n’est pas bonne, c’est que tu n’étais pas assez prés » (ou alors « prêt » aussi, peut-être, mais en anglais il n’y a pas de confusion, ni de sens supplémentaire, additionnel, joueur), oui, parce qu’il faut mettre de bonnes photos, qu’est-ce que c’est donc, une bonne photo ? Un point ? Un sujet ? Un moment ? Une photo de cinéma, Gregory Peck et l’ombre de Dorothy Mc Guire, « Gentleman Agreement »
(en français « Le Mur Invisible », 1947, Elia Kazan) aller au cinéma, viens on y va, au théâtre, voir des expos, viens on y court, on s’en fout (l’argent, oui on s’en fout) viens, allons-y, en métro ? Oui, et quelques fleurs pour ma tante
Oui, c’est chouette, un choix, une photo par mois.
Parfois, c’est bien ou ce serait suffisant !
[…] … », et oui, elle m’est apparue, parce que je pensais à ce qui était dit ici (on ne fait jamais que s’entregloser disait le bordelais Montaigne- il a son avenue à […]