Deux décembre – 644 (Oublier Paris #76)
froid entraîne métro – on marche moins, on marche quand même, on marche moins – on travaille encore toujours presque autant – on attend encore évidemment qu’on veuille bien numéroter les bons de commande; j’ai opposé une non-réponse à la comptabilité, c’est samedi matin réveillé à 4.44 et vêtu à 5.04, le signe du 4 sans doute (cette mélancolie ne cesse pas et ce ne sont pas les signes, idiots par essence (arbitraires euphémise Saussure) qui la changeront – elle s’est établie avec les premiers attentats, vers février quinze, et n’a cessé de s’accroître – qu’y faire je ne sais j’avance) il y avait sur le quai ces lumières et ce type qui portait sa guitare
il est probable que j’allais ou que je revenais du travail – je n’ai pas de pointeuse, je vais, je viens, on dit chance je réponds contrainte – puis il arriva
bruits gens arrêt descentes
la haine que j’entretiens pour cette société de transports (une société de transports en commun double le sens qu’elle indique : nous sommes de concert assis dans ces voitures ou ces wagons nous allons ici là en nous dévisageant sans trop le montrer le marquer le percevoir, on avance ainsi comme un peu des aveugles et le train s’en va
) cette détestation vient des couleurs dont sont parées les voûtes – c’est pour habiller dira-t-on mais est-on obligé d’habiller, et de un, et de manière aussi crue et de si moche insolence dans la laideur ? – cette détestation vient de ce qu’on inflige au passant des images abjectes le plus souvent décrivant avec une sorte de prétention sûre d’elle et revendiquant sa propre lâcheté dans l’invective et les ordres donnés des attitudes humaines à des êtres qui ne le sont plus, grossis, défigurés, souriants et jeunes – ils sont tous barbus, elles sont toutes hystériques et à moitié nues – si on ne veut pas regarder, on est obligé de courber l’échine comme des chiens, et d’avancer ainsi sans espoir d’avenir – les injonctions « soyez »(heureux) « payez »(moins) « choisissez » « faites » (vous plaisir) et j’en passe de plus ignobles encore – cette détestation aussi pour le remplacement par des robots des conducteurs (et les grèves, tu y penses aux grèves ? bien content de trouver ton métro robot ou pas… je me souviens de décembre 1995) – cette détestation pour cette régie et ses sièges anti-repos, anti-SDF, anti-mendiant, cette horreur, cette honte – cette détestation enfin pour le remplacement par des chiffres des noms des terminus des lignes (ça change tout le temps et puis les touristes, on y pense aux touristes ? cette ville est une ville touristique et d’ailleurs le tourisme est bien cette gale qui s’est emparée de nos pratiques) (enfin brisons là et parlons d’autre chose)
je ne certifie pas la barbe de 2 jours (je ne crois pas d’ailleurs) ni les chaussures pointues – comme quoi les signes sont trompeurs – j’aime assez le regard presque caméra sans doute caméra je ne sais si caméra du type à l’arrière-plan, mais l’attitude des doigts, l’imperméable épaulettes kaki les anses du sac le complet la chemise blanche enfin, le kit – on croise, on lit (« En observant Venise » Mary McCarthy, payot, 2003 – écrit fin des années 50) on avance et parfois on tombe sur mieux que la morne habitude quotidienne
en d’autres temps, n’eut-ce été cette mélancolie, j’aurais sans doute apostrophé cette dame (c’est une dame, en pantalon rouge) d’un « oh, il ne fallait pas…! » mais là, non, sans doute la perte des êtres chers augmentée de celle des objets et livres et autres encore choses qui meublent les souvenirs, probablement aussi un certain agacement vis à vis de la tourmente financière qui échoit du fait de l’incapacité des gestionnaires, ces retards, ces non-réponses (celle que j’ai opposée à la comptabilité ne change rien : il faudra bien qu’un jour j’appelle, je close, je paye et j’en finisse) ne changent rien, il faut continuer à marcher, et prendre encore ce satané métro…
au ciné « La villa » (Robert Guédiguian, 2017) émouvant, percutant, bon film (c’est toujours le trio qui tue – Ariane G JP ou Ariane JP G ou encore tu m’as compris, là ils sont frères et soeur, mais n’importe ça cogne un peu où il faut…).
En rentrant du 104, cette image floue d’une officine (grillades kebab) Istanbul qui indique sans le vouloir l’état d’une espèce de fascisme qui règne dans cette Turquie du bord d’Europe (on sait, on ne fait rien…)…
Bon dimanche par anticipation (back in babylone on monday).
le métro, comment y échapper, quand les voitures (l’ancienneté, le diesel, etc.) seront définitivement interdites – avant le reste de la France – à Paris ?
Pourtant, les « particules fines » dégagées par le freinage des rames de métro est assez conséquent, nous disent les spécialistes : il suffira donc de distribuer des masques à gaz à tout les utilisateurs souterrains (ou de surface), la « défense passive » a encore de beaux jours devant elle…
Il est vrai que les cinémas ne sont pas encore pollués (saur par des pubs interminables), restons-y au chaud !
moi froid ici égale nostalgie du métro et tant pis pour les laideurs dont on l’habille maintenant, et tant pis pour l’inconfort : à mes heures ce n’était pas assis mais maintenue debout serrée par les corps autour – et parfois avec sac disposé contre frôlements indiscrets ou davantage –
mais j’aimais bien en ce cas essayer de lire mon petit Platon…
et inventer par exemple à qui est destiné le bouquet de fleurs
quand à la finance…. me dis que vais avoir la chance de passer à côté de la folle consommation des fêtes, dignement