Carnet de voyage(s) #87
(un jour, je regarderais ces carnets et je ferais le décompte – est-ce que ça sert à quelque chose, ce genre de truc ? c’est juste la mémoire, mais est-ce que c’est la mémoire juste ? les photos ne nous trompent-elles pas ? certes, nous avons là toujours le même âge, toujours nous nous extasions devant les mêmes paysages, les mêmes mosaïques, les mêmes formes urbaines – je suis un peu azimuté par le livre que je lis – j’adore ça) ici des images retrouvées, je me souviens très bien
il pourrait s’agir de tombes, mais ce ne sont que des baignoires de bains publics… il faisait beau, à la sortie de ce jardin, une femme vendait des granites à la mûre (une vraie merveille), il ne faisait pas si chaud (trente sans doute) il devait y avoir quelques nuages, nous nous promenions (nous avions laissé derrière nous le jeune couple dont la composante masculine n’aimait point ce type de tourisme) (chacun ses goûts, mais pour ma part, plus jamais ça) nous allions ici ou là (au fond de l’image, une usine de mise en boite de thon – une thonnerie ? – désaffectée)
ça se passe dans une réserve naturelle, voit-on le baigneur ? petit point noir sur la baie
en voici un autre, les parasols, le ciel un peu chargé, on regardait les algues séchées, on regardait les oiseaux passer, libres comme l’air, au loin on discernait quelques montagnes
était-ce en août, je ne sais plus, une éternité depuis s’est écoulée, le sud de la Sicile, l’essence du baroque, à l’est au bout de la pointe sud du triangle, nous allions visiter cette jolie maison romaine dit-on
il y avait eu de la pluie, je me souviens tout à fait
on a beau tenter de réduire le flou, c’est intérieur, c’est dans l’image
des merveilles au sol, des merveilles au mur
non, le faisan était au sol aussi, ce doit être un détail, je ne sais plus bien, une éternité voilà tout, on allait à Modica
acheter du chocolat (on rapporte ça à truc, à machine, à bidule, les enfants, la voiture, les gens, j’ai pris une prune que je ne crois pas avoir acquittée, je ne sais plus bien)
il ne faisait pas si moche, en réalité
c’est une jolie ville, comme à Longwy il en est une haute et une basse, le soleil en plus certainement, (un jour je ferais le compte des villes que j’ai visitées, vues, dans lesquelles je suis passé et me suis arrêté en train, ça ne fait pas de doute, une liste voilà), maintenant je regarde ces images et je suis tout content
tout en haut de celle-ci on voit la rambarde du belvédère qui embrasse toute la ville, je ne suis pas sûr de retrouver, n’importe
je fais tourner GianMaria Testa, « preferisco cosi » (une merveille, un violoncelle) qui rappellerait presque Bartelby, rien à faire, il fait froid dehors aujourd’hui, les abrutis sont pléthore, ça ne fait rien on avance, pas vrai ici, là, j’ai beaucoup aimé rester un moment sur la terrasse de la maison de Michele (mais ils étaient deux frères, je ne sais plus, la maison de famille où ils étaient venus petits, des choses passent, le marbre et les reflets dans les portes…)
à ma gauche les oliviers (je la double : la chanson commence par « ta tatitida ta ta tidita »)
elle est mieux, un peu plus de la maison du voisin qui nous offrait des figues, tous les matins, vers six heures moins le quart ouvrait ses volets, passait un balai, vivait et marchait dans l’eau de long en large sur la plage, tous les matins, un vieil homme, face à moi ce soir-là peut-être l’orage
en est-ce un autre, est-ce le même jour ? les deux types, là, sous le soleil couchant
si tu me me le demandes, je te réponds qu’ils étaient allemands, sans doute, ou alors qu’ils venaient de Bologne ou de quelque part, au nord, quelque part au loin : là, c’est vers le sud, un autre jour, un autre matin
j’ai apprécié qu’ils aient posé là cette petite maison
(au premier plan, la citerne d’eau chaude) c’est au fond de la précédente qu’on découvre, au loin sur l’horizon, cette embarcation, un porte-conteneurs sans doute, encore faut-il fixer la ligne de partage de l’air à l’eau
au loin, il s’agit de Donnaluccata, au fond de la baie, il m’avait semblé disposer d’une image de cette église, un peu sur ma droite
la voilà, on avait droit aux heures, et au carillon vers 7, peut-être bien le matin, peut-être bien le soir, je ne sais plus, la liturgie tu sais, moi, quelle qu’elle soit, aurait tendance à me faire penser aux turpitudes subies, les sorcières, mon grand-père paternel, cette Saint Barthélémy, ces ordures laisse, va, laisse et au loin ne pas cesser de regarder l’avenir
rien à faire, la beauté des choses, allez continue va, continue
merci
oui on continue