Journal des Frontières gare de Lyon
« Partir, partir, un avion dans le coeur/… partir avant qu’on meurre » revenir, aller, venir, et encore ainsi chaque jour, chaque matin ici, chaque soir là-bas, l’arrivée du train en gare, quelle heure est-il, quel temps fait-il
en passant par Bastille, voici la gare
un train s’en va, un autre arrive fantômes d’un quai, d’une voie, de rails
c’est ainsi, mouvements pendulaires, êtres humains et lourdes et pesantes machines bruyantes
vélos, planches à roulettes, trottinettes, navetteurs navetteuses
arriver, courir, rejoindre le métro
le temps presse
mais j’étais en avance
il faisait beau sur Paris (hommage à Fellini)
un café au comptoir (un vingt) froid de gueux, pleurs aux yeux (c’est le vent)
(ou le froid) croiser des spécimens homonymes un peu partout (ici façade de la gare #280), là rue Abel au 1
(#281) et vient l’heure, le train s’est arrêté, ses lumières du blanc sont passées au rouge, lui est bleu
on voit au Train Bleu les tarifs (six dix le café, en est-il meilleur ? espérons-le, sans doute… menu à cent cinq « bon appétit Messieurs, oh ministres intègres, conseillers vertueux…« ), il y a sur les quais un K et un soleil radieux
ce sera réunion, tout à l’heure, mais à présent
se creusent les ombres
puis on s’en ira
j’ai pris des photos, j’ai enregistré des films, on passe sous les avions qui vont à Orly se poser avant de repartir vers là d’où ils viennent, incessantes navettes, on traverse ici un département, sans s’en rendre complètement compte, on passe les frontières, elles sont là, (inutiles ?) blessures des territoires, on passe des lignes imaginaires, je me suis posé la question de savoir ce que je pouvais bien faire là, le train courait vers Montgeron (des enquêtes, des mois durant, dans cette ville derrière Villeneuve-Saint-Georges : il va sans dire que tout parle), je n’ai pas lu mais j’avais non loin de moi « La modification » (Michel Butor, Minuit 1957) laquelle part d’ici, emprunte ces voies-mêmes, au loin je pouvais voir « Si par une nuit d’hiver un voyageur… » (Italo Calvino, Einaudi 1979, Seuil 1982) mais surtout, peut-être comme dans tous les voyages souvent au moins, nécessairement peut-être, « Le marin de Gibraltar » (Marguerite Duras, Gallimard 1952), la réunion eut lieu
à la bibliothèque de Montigny (merci de l’accueil…)
(croisé ce guide, bleu comme le train, et comme il se doit sans doute) puis les travaux fermant le restaurant de la ville, nous avons croisé à nouveau la grosse et teutonne berline à six mille cinq grise boitauto, puis en voiture avons gagné Fontainebleau (encore merci à toi, Sabine) où on croisa un éditeur
(est-ce un dragon ? est-ce une salamandre ? est-ce la même chose ?) et un autre spécimen
(et donc #282) le train de retour, l’enregistrement à la gare après quelques kilomètres à pied, penser repenser à partir revenir aller le matin retour à la nuit, en sens inverse, en une autre position, je me suis aperçu qu’à présent, dans le train, très nombreu-ses-x sont les assis-es -j’ai pensé aux voyageurs captés ce matin voiture de tête, je me suis souvenu des courses des bidasses de certains vendredis soir pour attraper le train à Montparnasse de la gare du Nord (c’est sans doute fini, ça, avec la conscription aux orties par mon Jacquot), coup de bol j’ai passé le « pass » (pfff) sur cette saloperie de mouchard
le type (au vrai ils étaient au moins deux) arpentait le train, contrôlait notre billet (une première, ce contrôle; si tu ne « valides » pas -ce vocabulaire idiot de société inepte – « composter » a au moins la faveur de la proximité du sens – tu en seras pour 5 euros : ce genre d’injonction, d’obligation, laisse rêveur car à quoi, et surtout peut-être, à qui, cela peut-il bien servir ? produire des data qui bientôt deviendront « big » avant d’être vendues à quelque commercial qui, lui-même, le matin, entre Marne-la-Vallée et la Défense, passera son « pass » sans se poser de question et surtout pas les bonnes – parfois, tu sais quoi ? on a juste envie de tout envoyer paître), on lisait, on parlait, on réglait, on avançait vers la ville, comme une sorte de vraie voyage, passer par ici, revenir par là, on arrive, on se sépare à la prochaine fois, on se parle au mail, on se dit quelque chose quoi on se réunit on voit on cherche on avance on pense, à la prochaine, numéro de passage, avancer sur le terrain de cette résidence, parler de cette ville au Loing à des personnes qui veulent en savoir plus (c’est aujourd’hui), emprunter un métro et, le soir, croiser une autre gare
Dans passager (de la pluie ou de la neige), il y avait déjà le mot « pass »…
(Au début de ton « post », je me suis demandé s’il fallait que je change mes lunettes)
@Dominique Hasselmann : (ensuite -sauf peut-être la dernière…- tu as réussi à te fier à tes lunettes hein…) (:°)) merci (c’est aussi qu’on ne doit pas nous reconnaître, tu comprends…)