Linge de lavande
Elle se servait de mots et d’encres pour illustrer ses images, je vais faire pareil, je me demande toujours quand j’en prends une, d’image, si l’important est au point ou à la vue, seulement l’important n’est peut être pas le point – on verra qu’il n’y est pas…- (il y a une chanson qui fait « toujours le poing levé » ça n’a rien à voir) (les mots, quels traîtres), alors j’avais à ce moment quatre cents kilomètres dans le dos (ma berline est confortable mais teutonne) et un peu d’eau de pluie sur le crâne (j’avais confondu un morceau de la rue de Charenton avec un autre, enfin n’importe), j’en étais arrivé au Cent d’icelle, entré dans le dépôt blanc, j’ai aimé ce lieu
les chaises vides d’avant le début
il y avait là de nombreux amis d’elle (elle aurait dit « des amis miens » oui), j’étais sans intention mais j’avais aussi dans l’idée je ne sais plus mais elle y était, qu’était-ce, ce soir-là, chez Pierre Ménard qui était là
Pierre Ménard à l’écoute
peut-être la première « d’ici là » ? je ne sais plus, le temps prend le sien et efface doucement, sans qu’on le sache vraiment, comme les idées comme les images, il y avait là donc un certain nombre de personnes, dont certaines (aux noms regroupés sur ce papier) allaient faire lecture de textes d’eux ou d’elle, Maryse
le tract de présentation de la soirée organisée par publie.net (auquel manque celui d’Isabelle Pariente-Butterlin)
il y avait donc des ami-e-s probablement, dont certain-e-s me sont aussi cher-e-s, il y avait le Chasse-Clou, il y avait un présentateur en chemise
Guillaume Vissac en monsieur Loyal
malicieux, traducteur (mari de Pénélope, tapisserie de longtemps bâtie: Maryse en parlera dans un mail à Florence Trocmé, tout à l’heure) de l’Ulysse de James Joyce, Guillaume Vissac, puis des textes, tirés de ces deux volumes, ou pas, et dits par ceux qui restent, donc, nous restons, têtus comme des bourriques, j’ai de chacun pris une phrase, quelque chose, une photo pour illustrer ses mots (si je ne travaille pas le point, c’est que je n’y puis rien, mais au cadre je m’emploie), que je pose en italiques sous ces représentations d’eux, ces images plus ou moins volées (personne ne vole personne) et les mots allant comme il leur semble bon (j’ai sûrement un peu cafouillé : qu’on m’en excuse…), ils iront ici
Christophe Grossi : No return, à quelques jours près
on parlera d’hommage entre crochets mais je n’aime pas tellement (c’est un peu comme la fierté, je n’aime pas), respects et hommages, quels sont donc ces mots, sont-ils pour des amis, je ne crois pas, ils vont sans les dire, pour les amis ce sont à jamais à toujours, les mots des chansons qu’on aime (moi, par exemple, ces temps-ci, c’est « je t’ai dans la peau » qui sermonne, tourne -ça fait un moment, paroles Gilbert Becaud tu me diras, jte dirais certes- et revient, « y’a rien à faire »), non les mots d’eux, les mots d’elles et les images aux cadres flous
Isabelle Pariente-Butterlin : Ce genre de bataille qu’on ne peut pas gagner
ces intonations et ces soupirs et les silences, oui, les silences des phrases qu’on tourne et des feuilles qu’on sépare
Thierry Lefevre et ses « baleines nonante et quelques » : Jaune de Naples… Où en est le lilas ?
des unes et des autres, les sons des sourires émus
Anne Savelli dans les blés de Georges Braque une des 15 cartes : Recueillir la matière du monde
les souffles des regards entendus, qui n’aime entendre les regards ? alors certes, hommage, pourquoi pas après tout, le mot lâché est aussitôt rendu à ses oublis, on se souvient d’elle, on se souvient de son jardin, du ciel et des onomatopées, des silence de ses phrases courtes dans la salle du Château Landon, ça n’a rien d’exceptionnel sauf que ça l’était, elle avait son turban sur la tête un jour, mais je ne sais plus
André Rougier : Le jardin immobile qui toujours sera tien
elle riait qui ne se souvient de son rire ? elle parlait, souriait, tout à coup sérieuse et grave, le monde est grave tu sais, et depuis que je n’entends plus la chanson de cette voix, la chanson oui, il y a celle de Violetta Para (chantée par Colette Magny, tu sais, sûrement tu sais, cette chanson qui fait « la lumière illumine l’âme de celui que j’aime », elle s’appelle « Gracias a la vida » ), il nous reste encore les mots enregistrés
Laurent Grisel Six heure quarante le bleu est en route
il nous reste les airs et aux ciels parfois quelques étoiles, c’est vrai nous sommes encore là, nous autres, la pluie et le vent de ce début de printemps, les jours qui s’allongent encore, les nuits qui s’éclairent
Florence Trocmé au dernier mail daté du douze, elle écoutait Schubert
on a beau faire mais parfois, tu sais, sans toi comme la vie est dure et longue tellement, tellement inutile, j’ai mis Supertramp parce que les airs me font souvenir de mes années d’avant, j’ai posé sur la platine une galette, il y a dans l’air des senteurs qui me font pleurer, est-ce allergie, est-ce dépit, est-ce désespoir, on reste là, on écoute dans les branches des buis et des ifs le passage du vent et des heures, ils s’en sont allés, ils sont partis, ils ne reviendront plus ces temps jolis et simples, où que tu sois, qu’importe ce soir-là, il y avait là un peu de toi, alors comme disait Christine
Christine Jeanney : Ils ont été tués par la mort
pour toi, nous autres, comme une missive, un bleu linge de lavande, la flamme tremblante d’une bougie et l’air doux et tranquille des chansons qu’on aime et pour Maryse comme pour vous, cette image du jardin à la nuit
En tout cas, et en même temps, l’Air Nu y était au (grand) complet (captation à venir sans doute probablement : on en remercie d’avance Mathilde Roux et Joachim Séné)
et merci d’une qui n’oserait se dire amie de Maryse, et de tous aussi que je découvre en chair, ou image de, ici (et pour certains je les voyais ainsi)
et merci pour les mots qui donnent en petites touches un peu de l’émotion (je crois que nous étions plusieurs en désir d’être avec vous, et qui trompions l’absence dans les mots et, oui, les dessins de Maryse Hache.
J’ai bien vu que tu prenais des photos et des notes, je me suis dit « il prépare un article »… alors, le voilà, et merci !
Merci! Comme Brigetoun, j’ai l’impression d’avoir été un peu là!
@brigetoun et Solange Vissac : vous auriez, sans aucun doute, été les bienvenues… merci du passage
@ Dominique Hasselmann : je vois sur ton billet du jour que nous étions pratiquement dans le même axe, mais je ne t’avais pas vu arriver…
Merci pour cet article, belle façon de prolonger cette soirée qui fut pour nous tous importante et très attendue.
Merci Piero, j’aurais tant aimé pouvoir être là pour Maryse, si attentive.
Le rire de Maryse et sa gravité, oui, « la chanson de cette voix », comme ils restent! Heureuse de vous lire et de voir les visages amis et ceux inconnus, là, tous pour elle.