Vases Communicants #54
Grand plaisir de retrouver Brigitte Célérier pour ce Vase communicant où elle flâne pour un moment dans son ancien quartier de Paris, tandis qu’elle accueille sur son blog Piero Cohen-Hadria. Qu’elle en soit ici remerciée. Bonne année à toutes et tous.
Rue de la Roquette
le bus emboque,
estuaire discret, la rue
de la Roquette,
j’y goûte le temps perdu,
les piétons nous dépassent
un libraire en allé, une librairie neuve, restaurants chinois, japonais, thaïs, épiciers arabes, cafés, on arrive dans mon ancien domaine, je descends
jour, trottoir vide,
devant théâtre, passants,
bouquiniste mort,
souvenirs s’entrechoquent,
attentes, écoutant, fumant
un coin vert serti
entres façades, vivant
mais sagement clos,
notre combat réussi
le vide sauvegardé
la tête est restée.
Blum, sa rose dans le dos,
a déménagé
Sages tournent les autos
un nouveau rond-point très laid
en août s’est vidée
la terrasse du Cadran
derrière métro.
Les cafés d’après marché
pauses dimanche matin
le poissonnier bleu
entre le bon fromager
et des légumes
y choisir un gros rouget
pour que mange mon père
rose doux et vert
la façade qui se joue
de la symétrie,
jamais je ne comprendrai
le goût que j’ai pour elle
un bazar profond,
le gentil ridicule
de mon pâtissier ;
pâte un peu brûlée, crème,
les tartelettes aux fraises
je me souviens d’en avoir apporté, après une opération, aidée par la fille des patrons qui a dû prendre la suite maintenant, eux et moi avons vieilli ensemble, deux plateaux aux infirmières de la clinique proche
portail et pigeons,
les restes de la prison
ouvrent sur jardin
debout en partie haute
livre sur buisson, lire
les arbres, trois bancs,
deux terrasses, et Ali
dont ne sais vrai nom,
Porte verte, une cour,
un escalier, mon taudis
quatrième étage, entre deux cours, près de quarante ans, souvenirs durs de la fin, partir par fenêtre ou au loin
Textes et photos : Brigitte Célérier.
Les autres échanges se trouvent ici réunis par Angèle Casanova, dont on loue la gentillesse et l’efficacité.
MERCI
souvenirs qui forment ces belles crêtes dans le présent…un endroit, un quartier et notre vie qui y prend ses racines de petit matin.
Blum s’est retrouvé sur la place qui porte son nom… Oui, les choses ont changé, c’est dans leur ordre.
Le rétroviseur appartient aussi aux piétons…
belle promenade dans la densité du temps et des souvenirs…
Beau pan de mémoire ouverte, compacte mais touffue.
Au carrefour de la rue Saint-Sabin bifurquent mes propres souvenirs qui ensuite tournent à main gauche vers la rue Sedaine
C’est beau, et la finesse poignante des détails dont on ne sait rien mais qui affleurent tous avec les nôtres là-bas, les rues qui deviennent aussi un peu à nous, merci Brigitte
un très grand merci pour vos lectures de nos vases