Pendant le weekend

Dix-neuf vingt sept cinq cent six-sept

 

 

condition que la nôtre, ainsi en va-t-elle : hier j’avais l’intention d’aller voir mon amie O. mais voilà, impossible : elle allait aux urgences, souffrant de quelque bronchite.

Bah, me dis-je – j’avais rendez-vous chez le comptable, puis je revins à pied, puis la vie s’en alla sa route, on sait bien comme elle est. Cette nuit, un rêve d’un texto m’est arrivé, de ma soeur me disant « D. nous a quittés », cette nuit, anniversaire de la mort de mon père (voilà quarante cinq ans), OSEF absolument de ce type de signe, mais enfin, ce matin je m’en allai travailler et voilà que le même texto m’est arrivé. Plus détaillé.

 

Je suis allé l’embrasser une dernière fois, donc, elle était chambre cent un au premier étage des urgences, dans des draps jaunes, son visage de profil, ses cheveux blancs et lisses, elle semblait dormir, finissant ses jours dans une chambre à numéro, comme durant toute sa vie (elle vivait dans la quinze sur le quai rive gauche).

Allons, il est temps de s’en aller. Je dispose dans mes dossiers « photos améliorées » de quatre vingt treize images des roses que je lui portais, une semaine sur deux, ou une semaine sur une, rangées (« rose rouge coeur ardent » disait la vieille nourrice de Nicki (Erland Josephson) dans « Dimenticare Venezia » (Franco Brusati, Oublier Venise, 1979) mais  elle, n’aimait pas le rouge aux fleurs – non plus qu’ailleurs, une superstition probablement- , il n’importe pas tellement mais je ne les lui offrais jamais que dans des tons clairs, ou pastels, ou n’importe mais pas rouge, son regard s’illuminait (« mais non, coco, disait-elle, tu ne devrais pas dépenser ton argent comme ça, pour des fleurs », elle les acceptait , elle qui était capable de laisser un billet de cent francs au Voltaire pour payer deux cafés qui en valait huit…)

Du plus loin qu’il m’en souvienne, toujours, elle m’a aidé. A présent, chemin faisant, les ans s’accumulant, elle s’en va, seule, tranquille. Le temps est passé, who’s next ? cette musique qui m’accompagnait alors, que sait-on de cette condition ? On en est arrivé au bout (elle était née en seize imagine, non, tu ne peux pas imaginer, non), il y aura là-bas aux côtés de son père une place qui lui est réservée, il y aura quelquefois mon ombre qui passera non loin, chemin Artaud, voilà tout, passent les jours et passent les semaines, où qu’elle soit à présent, elle est mieux qu’ici… Ciao, bambina…

 

 

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3 Comments

    On la salue et on l’embrasse avec vous : née en seize, elle en aura vu des choses ! Non, on ne peut pas imaginer, elle avait raison.

  • on ne peut déjà pas imaginer le milieu de ce siècle là…
    bel adieu, l’été est néfaste (une amie hospitalisée, mais plus jeune et issue moins dramatique)

  • Je t’embrasse, Piero…